La bibliothèque en vadrouille n° 107


 

Lieu : Grenoble (Isère), une des Trois Tours de l’Ile Verte
Date : 22 février 2017
Heure : entre 14h et 17h

 

 

Causerie avec Andrée Appercelle

La bibliothèque en vadrouille a pu rencontrer Andrée Appercelle, poétesse et organisatrice d’événements liés à la poésie en région grenobloise depuis les années 68.

C’est une jeune fille de 91 ans qui nous a reçus en toute simplicité : vagabondage à travers une vie entière dédiée à la poésie. Avec elle, c’est une véritable traversée du siècle qui s’opère : Aragon, Seghers, Giono, l’année 1968 et l’invitation de Miguel Angel Asturias, ses amis peintres, le dialogue avec une illustratrice pour la réalisation d’un ouvrage sur les Inuits, son expérience à la radio : une vie multiple et sans cesse curieuse et donc autant de balises que ce billet propose de résumer via un parcours sonore et visuel (vues de son appartement-atelier).

Les éléments biographiques repris en partie ici, proviennent d’un travail entrepris par Pierre Vieuguet, ancien directeur des Bibliothèques de St Martin d’Hères, cofondateur en 1985 de la Maison de la Poésie Rhône Alpes qu’il dirige de 1985 à 2011. Depuis, vice-président et responsable de ses éditions. Qu’il soit remercié pour ce travail défricheur.

Pour structurer l’entretien, plusieurs lectures (extraits) rythment la conversation : en voici la liste :

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Balise 1 : l’enfance et les débuts d’une conscience politique et poétique intimement mêlées

Andrée Appercelle est née à Grenoble, rue Nicolas-Chorier, le 14 décembre 1925. Son grand-père maternel, Elie Boissier, l’a fortement marquée. Son père, Adolphe Fugier, employé de banque, est pour elle un ami. Sa mère, Alice, est brodeuse à domicile. Fragile dès l’âge de 5 ans , elle va peu à l’école. Fille unique, elle est solitaire et lit beaucoup.

Elle garde souvenir du Front populaire, des bagarres dans la rue, de la solidarité. Son père l’emmène dans les manifestations. La guerre, la répression des jeunes résistants du Vercors par les Allemands, les faux papiers. Elle quitte tôt le lycée et entre en préfecture de l’Isère début 1946. Elle s’inscrit à l’association des jeunes du Rayon qui lui donne envie de vivre.

En 1948, elle part pour Paris comme sténo-dactylo. Elle vit dans une chambre de bonne. Elle étouffe et pense à la nature, aux marches en montagne. Elle écrit beaucoup. Elle rencontre, en 1949, Gérard Appercelle puis se marie avec lui en 1951 à Paris, dans le 9e arrondissement. D’égal à égal, il l’accompagnera plus de soixante ans dans sa vie de poète et sa liberté.

Balise 2 : Louis Aragon et les autres auteurs libertaires

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Balise 3 : Eslsa Triolet et la question de la traduction

En 1967, elle réalise à la radio Le risque de traduire, avec la complicité de Georges Kassai, traducteur du hongrois, de l’espagnol en français et chargé de cours dans les années 1990 à l’Université Paris VII.
Retour sur une activité particulièrement difficile, l’on pense à cette réplique du film Paterson  dite par un poète japonais interprété par Masatoshi Nagase :  « Traduire la poésie, c’est comme prendre une douche dans son imperméable. »

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Balise 4 : Pierre Seghers, éditeur pionnier ou la poésie dans les veines

L’éditeur Pierre Seghers publie ses deux premiers recueils Fraîcheur et Senteurs de mousse en 1953 et 1954. Elle rencontre le graveur et éditeur Marc Pessin avec qui elle réalisera nombre de ses projets. Andrée à ce stade de l’entretien définie sa poésie : davantage extérieure (à l’écoute des autres et du monde) qu’introspective.

Lecture…

Écoutez un extrait de Fraicheur lu par Pierre Vieuguet et le commentaire d’Andrée Appercelle sur le contexte de création du poème.

Balise 5 : Jean Giono et les Jardins de curés

Lecture d’un texte tiré d’un récit publié après la mort de Giono, Faust au village, fragment pessimiste qui fait écho au début de l’entretien, où Andrée pacifiste convaincue semblait sceptique sur le devenir de l’humanité : humeur passagère ou regain de lucidité ?

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Balise : 1968, les poèmes-objets de la Semaine Internationale de Poésie et M. Angel Asturias à Grenoble.

Toutes ses rencontres et sa correspondance alimenteront ses nombreux Murs de Poésie à Grenoble, en particulier pour l’inauguration de la Maison de la culture de Grenoble en 1968 où elle expose des peintres et poètes de vingt-trois pays  dont le guatémaltèque Miguel Angel Asturias qui va recevoir bientôt le Prix Nobel. Plusieurs textes des poètes choisis s’opposent à la guerre américaine au Vietnam et vont faire événement. On ne compte plus ses invitations de poètes avec l’Union des écrivains qu’elle préside à la suite de Gabriel Cousin, dans les bibliothèques et salles associatives sur Grenoble ou Saint-Martin-d’Hères. Elle présentera Pierre et Colette Seghers, Andrée Chédid, Rabah Belamri, Tahar Ben Jelloun, Driss Chraïbi, le romancier argentin Oswaldo Soriano, Marie-Claire Bancquart et tant d’autres.

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Balise 7 : Ses amis peintres et artistes

En 1955, le peintre et poète brésilien Vincent Monteiro, éditeur de la Presse à bras, l’invite à ses Murs aux poèmes à La Coupole. Elle y rencontrera Tristan Tzara, Eugène Guillevic, Jean L’Anselme, Georges-Emmanuel Clancier, Robert Sabatier, Jean Follain, Edmond Humeau... Elle écrit et publie quatre recueils de poésie à La Tour de Feu.

Cette année là, elle revient s’installer à Grenoble avec Gérard qui a trouvé un travail.

Influencé par Vincent Monteiro, elle  y démarre le premier Mur de poésie, réunissant poètes et plasticiens. De 1953 à aujourd’hui, ses publications et livres d’artistes sont innombrables. Les peintres ont toujours accompagné ses éditions : Henri Cueco, Ernest Pignon Ernest, Marc Pessin, Mariette, Anne Slacik

Balise 8 : L’ouvrage réalisé avec Ginette Trépanier

Poésie Inuit, les passages du Grand Nord (le Nunavik) a été réalisé en collaboration Andrée Appercelle.

Après l’évocation de cet ouvrage, Andrée Appercelle réagit à ce propos de Kandinsky et se souvient des maisons visitées en Union Soviétique…

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Balise : La radio : sa rencontre avec Paul Gilson et les lectures réalisées pour Radio FR3-Grenoble (avec Chris Déis et Ghaouti Faraoun).

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Ses émissions à l’ORTF, sur France-Culture, ses interviews de Jean Sénac, de Georges-Emmanuel Clancier, entre autres, ses lectures sur Radio FR3-Grenoble, alimenteront son intense travail de poète et d’animatrice de la vie poétique à Grenoble et en région. Sur les photographies reproduites, des bandes d’une émission réalisée avec Michel Seuphor : écoutez un entretien autour d’une exposition Seuphor, visitée à Grenoble, en novembre 2016.

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Balise 10 : Le regard d’une éditrice : Dominique Iacovella (La rumeur libre)

Au salon du livre 2017, Livre Paris, nous avons pu nous entretenir avec Dominique Iacovella qui prépare avec Andrée Appercelle, une anthologie de ses poèmes qui devrait paraître d’ici l’été. Retour sur la fabrication d’un tel ouvrage et quelques informations sur le pari éditorial de cet éditeur ligérien qui a également lancé une revue qui fait part belle aux jeunes poètes (la pépinière) : Rumeurs (déjà 2 numéros sortis, le troisième en préparation).

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Une importante bibliographie établie par Pierre Vieuguet est à consulter ici.

Légende : Aperçu des éditions d’Andrée Appercelle.

Textes, entretien et photographies : Fabien Vélasquez
Remerciements : Andrée Appercelle, Dominique Iacovella, Pierre Vieuguet et la Maison de la Poésie Rhône-Alpes.