La bibliothèque en vadrouille n° 85


Lieu : Lausanne, Palais de Rumine
Date : 1er octobre 2016
Heure : entre 11 :00 et 14 :00

0

Les conseils des invités de la 4ème édition de Tirage Limité

La 4ème édition de Tirage limité, Rencontres romandes du livre d’artiste se tenait au Palais de Rumine. Avec le Québec invité d’honneur, la journée était placée sous la bannière éclatante de « Vive le Québec Livre ! » Les artistes invités de Suisse romande et France voisine, ont eux aussi apporté leur idées foisonnantes et un savoir faire minutieux, parfois très innovant.
Une déambulation haute en couleur, curieuse et riche en découvertes. Quatre stations que voici :

#1 Entretien avec Silvio Corsini

0

Légende : Un stand dans le Palais de Rumine et la table ronde Territoire du livre, du 30/09 présentée par Silvio Corsini

0

0

Silvio Corsini, conservateur des livres précieux de la Bibliothèque Cantonale et Universitaire de Lausanne et président de l’association Tirage limité nous a accordés quelques minutes au cours desquelles, il a tracé un rapide historique de cette manifestation triennale. Pour lui, il n’est pas concevable de mettre des livres en vitrine, préférant la forme ouverte et dynamique de l’événement, il qualifie Tirage limité de « one shot » effervescent, où les livres sont accessibles et manipulables par le public durant une journée gratuite. Pour lui, le livre d’artiste, de peintre ou plus contemporain échappe totalement du marché de l’art, il est souvent réalisé entre amis et conserve ainsi une fraicheur et une vitalité, que l’on perçoit aisément en déambulant dans les divers stands installés dans les couloirs du Palais de Rumine.
Silvio Corsini poursuit la discussion, en évoquant un métier important dans la découverte et la diffusion des livres d’artistes auprès des institutions : celui de colporteur, en citant l’exemple de Robert Subtil, installé aujourd’hui dans le Trièves.
L’entretien se termine par l’évocation d’un livre dont la BCUL conserve un exemplaire unique : le dernier ouvrage d’Aimé Maeght réalisé au début des années 80 avec le peintre hongrois François Fiedler, il s’agit de L’Évangile selon saint Matthieu. L’impression de l’ouvrage n’ayant pu aboutir en raison du décès d’Aimé Maeght en 1981. Lire à ce sujet l’article que Silvio Corsini a rédigé en 1996 dans le tome 39 de la Revue de la Société Suisse des Bibliophiles, accessible en ligne ou en pdf.

0

#2 Entretien avec Alain Wenker (Encre & plomb)

0

0

Nous rencontrons ensuite Alain Wenker, un passionné, membre de l’association Encre & plomb, basée à Chavannes-près-Renens, venu avec d’autres bénévoles, réaliser des démonstrations de composition manuelle sur la célèbre presse Johannisberg du XIX° siècle.
Alain revient sur la naissance de cette association dans les années 80 et évoque sa formation à la fin des années 60, à Paris, à l’École Estienne. Durant ses études, il a eu l’occasion de voir le Psautier dit de Saint Louis. Il évolua ensuite en tant que directeur technique adjoint des Imprimeries Réunies de Lausanne qui ont fonctionné sous cette dénomination de 1982 à 2015. Durant ses années dans cette entreprise, il a eu la chance de participer à l’aventure Skira, le premier éditeur à avoir introduit la couleur dans les reproductions de livres d’art : riche période d’innovation et d’expérimentation dans l’édition dont il se souvient avec bonhomie.

0

#3 Simon Bossé et Mille putois

0

0

Nous rencontrons ensuite Simon Bossé, le fondateur des éditions Mille putois au Québec. Simon nous dit quelques mots sur le projet DISTROBOTO, « un réseau de machines distributrices de cigarettes qui vendent maintenant de l’art (plutôt que des cigarettes). On y retrouve de petits livres, des bandes dessinées, des mini-CD-Rs (musique ou film), des objets d’art et beaucoup d’autres surprises. Le projet est à but non lucratif. Chaque œuvre est vendue 2,00$ et tous les profits sont remis à l’artiste (1,75$ pour chaque vente). » Une de ces machines est installée en France, à la fanzinothèque de Poitiers. Simon a apporté avec lui plusieurs exemplaires de l’Atlas sérigraphique montréalais, une publication monumentale regroupant le travail de 19 affichistes canadiens, tous et toutes réunis dans cet ouvrage relié où les affiches sérigraphies aux couleurs psychédéliques semblent sortir de la page, tellement leur éclat est vif et lumineux !
Lors d’un précédent passage en Suisse, en 1993, Simon décida de rendre visite à Christian Humbert-Droz, le fondateur des Editions Drozophile … une rencontre fondamentale pour le jeune apprenti sérigraphe.

 

0

#4 Danielle Blouin et Le Livre délinquant

img_3070

0

0

Nous rencontrons ensuite Danièle Blouin, artiste, historienne de l’art passionnée par l’édition. En 2001, elle a publié aux éditions Fides, une étude de référence : « Le livre délinquant : Les livres d’artistes comme expériences limites ». Danielle cite deux ouvrages qu’elle considère comme clé dans l’histoire de l’édition au Canada : 1931, avec le Metropolitan Museum : un poème de Robert Choquette illustré par Edwin H. Holgate et 1953, avec Images apprivoisées de Roland Giguère publié aux fameuses éditions ERTA. Danielle a tenu à inviter des artistes emblématiques de la vitalité de la scène québécoise : d’où la présence d’artistes comme Pascaline Knight, Isabelle Ayotte, Guylaine Couture, Jacques Fournier ou Simon Bossé.  Nous profitons de ce temps d’échange très fluide avec Danielle pour lui demander le nom d’un-e artiste québecoise  explorant le champ du numérique : elle cite spontanément Judith Poirier (Découvrez par exemple, le projet La chose imprimée initié en 2010) – dont les questionnements ne sont pas éloignés de ceux traités dans une récente exposition présentée au Mudac de Lausanne (de mars à août 2016) : Qu’en lira-t-on ?.

0

#5 Quelques éditeurs découverts

0

Notre déambulation nous a conduit à nous arrêter sur quelques stands, comme celui des éditions A l’Envers, très fières d’avoir remporté le prix de la fondation Engelberts avec l’ouvrage très simple d’Olivier Lovey, Puissance Foudre. Juste avant de remettre le prix (le 30 octobre, lors de la pré-ouverture de la manifestation) aux éditeurs, l’auteur étant absent, Monsieur Engelberts a tenu à dédier cette cérémonie à son père qui fort de son amitié avec Georges Braque depuis 1957 put contribuer à la réalisation du célèbre Lettera amorosa, que le peintre réalisa en 1963 avec René Char.
Un second prix, remis par la BCUL a été attribué à Monica Lombardi, qui avait déjà obtenu cette distinction lors de la seconde édition de Tirage Limité en 2010. Son travail tout comme celui de dix autres artistes, a pu être présenté dans l’espace baptisé UNICA ! mis en scène et commissarié par Zivo.

Nous avons pu échanger un moment avec Izet Sheshivari, fondateur des éditions Boabooks, basées à Genève, dont le catalogue exigeant fait la part belle aux artistes conceptuels : Carrión, Hiller, Mosset ou Watier.

Parmi, les invités étaient présentes les éditions jurassiennes Du Goudron et des plumes auxquelles la bibliothèque en vadrouille avait déjà consacré un billet à l’occasion de leur exposition à l’artothèque de Montbéliard en septembre 2015 : le réécouter ici.

#6 Pour aller plus loin, sur le même sujet…

Légende : Rues de Lausanne, une boite électrique aux couleurs de Dubuffet indiquant le chemin de la Collection de l’Art Brut et une boite à livres près d’une cabine téléphonique

A noter également, à signaler, à flécher : trois autres billets sur des sujets liés à l’édition à tirage limité et à l’édition de livres d’artistes :

Une étagère thématique en ligne (étagère virtuelle) recense les livres d’artistes et livres objet de l’Espace multimédia gantner, à consulter sur le catalogue en ligne de la médiathèque.

0
Texte, photographie et entretien : Fabien Vélasquez
Relecture : Josiane Bataillard
Remerciements à toutes les personnes rencontrées et à tous les artistes présents, amis ou inconnus avant cette journée.