La bibliothèque en vadrouille n°41


Lieu : Le Granit, Galerie du théâtre et La Poudrière (Belfort)
Date : 4 et 30 septembre 2015
Heure : entre 22 : 00 et 22 : 20
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Les conseils de Chloé Poizat , Gianpaolo Pagni et les membres de Lady Boy
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Vernissage

Nous avons rencontré ces deux artistes plasticiens à l’issue du vernissage de l’exposition intitulée Nos pièces montées visible au Granit jusqu’au 30 septembre.
Un foisonnement (dédale de dessins, volumes, éditions, livres d’artistes) est soigneusement installé dans la galerie du Granit.
L’originalité de ce travail vient du fait que les deux plasticiens et illustrateurs ont tenté une expérience débutée en 2011 consistant à partager une même feuille de papier selon un protocole particulier décrit plus bas.
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Extrait de la note d’intention décrivant l’exposition sur le site du Granit :
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Gianpaolo Pagni et Chloé Poizat, qui nous accompagnent toute cette saison en signant le visuel de notre programme, sont tous les deux artistes plasticiens et illustrateurs, vivant ensemble et partageant le même atelier. En août 2011, ils décident d’entreprendre un travail commun sur une même feuille de papier ayant comme règle de commencer le dessin à tour de rôle. Chloé dessine au stylo-encre et Gianpaolo aux tampons. Nos Pièces Montées : c’est jouer avec le dessin de l’autre, le métamorphoser, se l’approprier, se défier, accepter de ne pas terminer son dessin, qu’il change de direction, qu’il soit sauvage. C’est une conversation graphique entre deux dessinateurs, le mariage de deux univers. Gianpaolo utilise les tampons comme des outils lui permettant d’explorer la multiplication du geste et du signe. Il compose comme un vocabulaire qui s’adapte à chaque nouvelle œuvre. Lié au souvenir, à la trace, il travaille souvent par recouvrement voire effacement en détournant des supports variés.
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Lors du vernissage Chloé et Gianpaolo ont pu dédicacer leur livre paru aux éditions Cornélius. Une maison d’édition fort intéressante que nous avions eu l’occasion de connaître à l’occasion de l’exposition Bofa présentée en 2013 à la bibliothèque municipale (Voir le billet du blog rédigé à l’époque).
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Après un repas très chaleureux durant lequel la dizaine de convives réunis par Pierre Soignon ont pu échanger et discuter activement, nous avons pris un moment pour converser avec Chloé et Gianpaolo à l’extérieur dans l’un des escaliers internes du Granit menant des bureaux à la salle de danse surplombant la Savoureuse, panorama toujours apprécié des non belfortains, invités de la galerie et du théâtre. Un bel échange au cours duquel furent évoqués maints sujets :
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L’origine de cette exposition (et son titre), le couple [Nous avons posé une question inspirée de la lecture d’une série (n° 1,2, 3, 4 et 5) parue dans Libération cet été, intitulée «HEUREUX EN MÉNINGES» : En quoi le couple stimule la création ?]

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Enfin, nous demandons à chacun la rituelle question d’une lecture-source, inspirante pour leur travail, c’est Gianpolo qui s’y colle qui cite l’imagerie populaire à travers l’exemple de sa collection de vignettes Panini, célèbres portraits de footballeurs regroupés dans des albums, complétés et collectionnés depuis la fin des années 70, qui sont devenus aujourd’hui des cimetières de têtes…
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Gage de complicité, Chloé souffle à Gianpaolo le nom de Georges Pérec, comme une référence fondamentale sous-jacente au travail de Gianpaolo qui nous révèle (nous ne le savions pas) que le célèbre Je me souviens de Pérec est une adaptation d’un procédé inventé par un artiste américain Joe Brainard (1941-1994).
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C’est ensuite Chloé qui se livre à l’exercice : elle cite spontanément un roman de H.G. Wells qui est véritablement une clé de lecture pour l’exposition : « L’Île du docteur Moreau », publié en 1886.
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Elle ajoute et précise avoir aussi été marquée par la méthode de travail de Sebald, cet auteur allemand qui travaille avec beaucoup de documents, potentiellement déclencheurs d’idées. « Ce rite de la promenade » lié à cet auteur ou bien encore à Robert Walser.
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Enfin Chloé nous a expliqué qu’elle a l’habitude de noter rigoureusement des listes de mots au fur et à mesure de ses lectures pour en faire ensuite des tableaux de mots.
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Notons également, qu’elle a réalisé plusieurs éditions avec la très originale maison Derrière la salle de bains, un éditeur qui investit de manière remarquable et soignée le champ de la microédition.
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A noter dans vos agendas, le 30 septembre à 18 : 30, un concert qualifié d’Odyssée gainsbourienne par la Poudrière qui invite Ladyboy / Olivier Hazemann pour lequel Chloé et Gianpaolo ont réalisé une pochette et une vidéo d’animation..

.Le mouvement perpétuel

Prolongement au billet débuté le 4 septembre dernier : retrouvailles en ce 30 septembre avec Gianpaolo Pagni dont nous avons découvert tout récemment la contribution à Perpetuum mobile, un ouvrage (fort intéressant pour le fonds spécialisé) que l’on doit à un touche à touche, singulier « fou littéraire » considéré comme un pionnier de la poésie phonétique : Paul Scheerbart (1863-1915).
Ce dernier a passé deux ans à tenter de réaliser un mobile dont le mouvement serait perpétuel, expérience dont il rend compte avec humour et philosophie dans ce petit ouvrage. Publié en Allemagne en 1910, le texte de Perpetuum Mobile a paru pour la première fois en français dans la revue Bizarre, aux éditions Jean-Jacques Pauvert, en juillet 1958. Pour la réédition (2014) chez Zones sensibles, un éditeur bruxellois très soucieux du livre (lire leur manifeste), Gianpaolo a conçu la couverture et réalisé un pop up.

Chloé et Gianpaolo ont ensuite gentiment dédicacé (en ajoutant un dessin et un tampon originaux pour la médiathèque) dans Livres Uniks, le catalogue collectif publié à l’occasion de l’exposition visible du 13 mars au 13 juin 2015 à Topographie de l’art.

  • Lady Boy project : un Objet Scénique Non Identifié (OSNI)

A l’issue du concert dans la loge, nous rencontrons Olivier (chant et textes) et Xavier (vidéo), tous deux réagissent à la première présentation de cette forme hybride, alliant chant, projection vidéo (films d’animations et dessins numérisés) et illustration sonore (violoncelle, piano, batterie et objets sonores).

Olivier nous dit quelques mots sur une édition artisanale conçue dont Chloé Poizat a assuré la coordination : un très original disque objet : L’album en série limitée avec un livret sous forme de leporello ainsi qu’une clé USB de 2GO contenant l’album au complet (en MP3 et AIFF: format CD) avec un player, les textes ainsi que le clip de « Ma prestigieuse ».
Cette édition traduit à la fois un goût de la délicatesse et l’envie de vouloir fabriquer un objet à la fois matériel (livret) et immatériel (fichier mp3).

 

  • Benjamin, musicien, éditeur basque, ami de Mathieu Messagier, le franc-comtois

    Nous rencontrons ensuite Benjamin qui a joué avec Lady Boy.Également poète et éditeur, il nous montre une planche réalisée la veille chez lui, avant de prendre la route de Belfort.

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Nous apprenons très vite, que Benjamin est un proche de Mathieu Messagier qu’il a connu via Nicolas Sornaga (le cinéaste, auteur du dernier des immobiles) : il a d’ailleurs édité un récent recueil de Mathieu, intitulé « L’handicapé des mers des Sud et autres poèmes sans fin », microédition que Benjamin va faire parvenir bientôt à la médiathèque. [déjà 9 textes de ce poète et le film cité disponibles dans les collections]

Il nous suggère deux conseils de lectures insolites, entre humour et dérision…

  • Louise, violoncelliste et lectrice

Nous faisons enfin la connaissance de Louise, jeune violoncelliste venue rejoindre Lady Boy pour la première fois. Cette prestation collective « métissée », vécue dans un cadre intimiste fut pour elle, inspirante et mémorable. Elle nous confie ensuite, une manière particulière de répéter ses gammes qu’elle a expérimentée dans le passé.

Puis, elle recommande la lecture de l’Œuvre de Zola et de Du domaine des Murmures de Carole Martinez.

Bibliographie : 5 références disponibles à la médiathèque ou en ligne :
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  • Cursif. [Texte imprimé]. 1, Le dessin dans tous ses états / Patrick Descamps ; Savine Faupin ; Mâkhi Xenakis. – Arles (Bouches-du-Rhône) : Analogues, 2011. – 1 vol. (127 p.) : illustrations en noir et en couleur ; 24 x 20 cm.
    Publié à l’occasion du programme Dessiner-Tracer organisé dans 20 musées dans le Nord-Pas de Calais, la Picardie et la Belgique, de l’automne 2011 à l’automne 2012.

Résumé : Un état des lieux du dessin dans les collections publiques belges et françaises, de la dimension patrimoniale à la création la plus contemporaine : la revue accompagnant la manifestation Dessiner-Tracer (un programme de 40 expositions dans une vingtaine d’institutions, s’appuyant sur l’inventaire des collections publiques de dessin).
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  • L’homme invisible [Texte imprimé] / H.G. Wells ; ill. de J.M. Folon ; [trad. par Achille Laurent]. – [Paris] : Ed. du Chêne, 1994. – 190 p. : ill. en coul. ; 27 cm.
    ISBN 2-85108-835-1 (br.) : 149 F

Résumé : Sous le pinceau de Folon, le héros invisible prend une dimension quasi fantasmagorique.
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  • « Regarde de tous tes yeux, regarde » [Texte imprimé] : l’art contemporain de Georges Perec : [exposition, Nantes, Musée des beaux-arts, 27 juin-12 octobre 2008, Dole, Musée des beaux-arts, 21 novembre 2008-21 février 2009] / [catalogue par Blandine Chavanne, Jean-Pierre Salgas, André Rouillé, et al.]. – [Nantes] : Joseph K. : Musée des beaux-arts de Nantes ; [Dole] : Musée des beaux-arts de Dole, DL 2008. – 1 vol. (126 p.) : ill. en noir et en coul., jaquette ill. ; 22 cm.
    Contient :  » Le Centre Georges Perec « / Jean-Pierre Salgas.  » L’art d’après la photographie « / André Rouillé.  » Le «romans» de l’artiste contemporain « / Jean-Luc Joly.  » Georges Perec  » = une autobiographie desmodromique / Bernard Magné.  » L’écriture photographique de Georges Perec  » = suivi de 39 polaroïds / Christelle Reggiani ; Georges Perec.  » Duchamp à l’Oulipo « / Marcel Bénabou. -ISBN 978-2-910686-50-5 (br.) : 20 EUR
    Résumé : A l’occasion du 30e anniversaire de la publication du roman de George Perec, La vie mode d’emploi, le Musée des Beaux Arts de Dole propose une lecture perecquienne de l’art contemporain de ces quarante dernières années.
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  • A noter également : dans son numéro 27 (Automne 2012, 174 pages), la revue AREA a consacré un large dossier à la question – dossier intitulé Le couple à l’œuvre.
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  • Nous renvoyons également le lecteur vers deux billets plus anciens et dont le sujet est aussi lié au dessin et à l’illustration : le coup de cœur de Gaëlle Partouche, libraire à Grenoble autour de l’expo-chantier Les Cahiers dessinés et le travail en cours ayant donné lieu à une résidence à l’Espace multimédia, avec le dessinateur Johanny Melloul et ses invités.
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Textes, photographies et entretien : Fabien Vélasquez
Remerciements : Pierre Soignon, Chloé et Gianpaolo et tous les membres de Lady Boy.